Villeroy prit son temps de l'issue de l'
affaire des bâtards et de cette prétendue noblesse, dont on avait su faire peur au
régent, pour lui représenter la triste situation de
Tallard et profiter du malaise qui troublait encore ce prince. Le moment fut favorable; il crut s'acquérir Villeroy et les
Rohan en traitant bien Tallard. Il imagina que, tenant tous aux bâtards, et par conséquent à cette prétendue noblesse, le bon traitement fait à Tallard plairait au public et lui ramènerait bien des gens. Les affaires, importantes avaient déjà pris le chemin unique de son cabinet, et n'étaient presque plus portées au conseil de régence que toutes délibérées, et seulement pour la forme. Ainsi, le régent crut paraître faire beaucoup et donner peu en effet, en y faisant entrer Tallard, qui de honte, de dépit et d'embarras, ne se présentait que des moments fort rares au Palais-Royal. La parole fut donc donnée au maréchal de Villeroy, avec permission de le dire à Tallard sous le secret, qui, dès le lendemain, se présenta devant M. le duc d'Orléans. Il avait voulu se réserver de lui déclarer et de fixer le jour de son entrée au conseil de régence. Un peu après qu'il fut là en présence, parmi les courtisans, le régent lui dit qu'il le mettait dans le conseil de régence, et d'y venir prendre place le surlendemain.
Dès que je le sus, je sentis la difficulté qui se devait présenter sur la préséance entre lui et le
maréchal d'Estrées qui y venait rapporter les affaires de marine, et qui d'ailleurs y entrait avec les autres chefs et présidents des conseils quand on les y appelait pour des affaires importantes. J'aimais bien mieux Estrées que Tallard, et pour l'estime nulle sorte de comparaison à en faire en rien. Le public même n'en faisait aucune, et tout était de ce côté-là à l'avantage du maréchal d'Estrées, mais j'aimais mieux que lui l'ordre et la règle, et sans intérêt (car je n'y en pouvais avoir aucun entre eux), l'intégrité des dignités de l'État. Tous deux étaient maréchaux de France, et dans cet office de la couronne Estrées était l'ancien de beaucoup; mais il n'était point duc et Tallard l'était vérifié au parlement; il est vrai qu'Estrées était grand d'Espagne, beaucoup plus anciennement que Tallard n'était duc, et que, comme aux cérémonies de la cour les grands d'Espagne, comme je l'ai expliqué ailleurs, coupaient les ducs, suivant l'ancienneté des uns à l'égard des autres, Estrées précédait Tallard aux cérémonies de l'ordre et en toutes celles de la cour. Mais, dès la première fois que le conseil de régence s'était assemblé, il avait été réglé, comme je l'ai rapporté en son lieu, que le maréchal de Villars précéderait le maréchal d'Harcourt, celui-ci duc vérifié beaucoup plus ancien que l'autre, mais Villars plus ancien pair qu'Harcourt, parce que les séances du conseil de régence se devaient régler sur celles qui s'observent au parlement, et aux états généraux et aux autres cérémonies d'État où la pairie l'emporte. Il en résultait qu'entre deux hommes qui n'étaient pas pairs, mais dont l'office de la couronne qu'ils avaient tous deux se trouvait effacé par une autre dignité, c'était cette dignité qui devait régler leur rang. Ils en avaient chacun une égale, mais différente: l'une était étrangère, l'autre de l'État. Cette dignité étrangère roulait à la vérité par ancienneté avec la première de l'État dans les cérémonies de la cour; mais comme telle, elle ne pouvait être admise dans une séance qui se réglait pour le rang par la pairie, parce qu'il s'y agissait de matières d'État où elle ne pouvait avoir aucune part; au lieu que la dignité de duc vérifié en étant une réelle et effective de l'État, avait, comme telle, plein caractère pour être admise aux affaires de l'État, et ne l'y pouvait être que dans le rang qui lui appartenait, d'où il résultait qu'encore que le maréchal d'Estrées eût dans les cérémonies de la cour la préséance sur le maréchal de Tallard, celui-ci la devait avoir sur l'autre dans les cérémonies de l'État, et singulièrement au conseil de régence établi pour suppléer en tout à l'âge du roi pour le gouvernement de l'État.
Je ne pus avertir Tallard qu'aux Tuileries, un peu avant le conseil. Sa joie extrême allait jusqu'à l'indécence, et ne lui en avait pas laissé la réflexion; il en dit un mot au maréchal d'Estrées qui devait rapporter ses affaires de marine, et tous deux en parlèrent à M. le duc d'Orléans, quand il arriva un moment après, qui leur dit que le conseil les jugerait sur-le-champ. On se mit en place; les deux maréchaux se tinrent debout derrière la place où j'étais. Estrées parla le premier; Tallard, étourdi du bateau, s'embarrassa. Je sentis qu'il se tirerait mal d'affaire, je l'interrompis, et dis à M. le duc d'Orléans que, s'il avait agréable de prier MM. les deux maréchaux de sortir pour un moment, je m'offrais d'expliquer la question en deux mots, et qu'on y opinerait plus librement en leur absence qu'en leur présence. Au lieu de me répondre, il s'adressa aux deux maréchaux, et leur dit qu'en effet il serait mieux qu'ils voulussent bien sortir, et qu'il les ferait rappeler sitôt que le jugement serait décidé. Ils firent la révérence sans rien dire, et sortirent.
J'expliquai aussitôt après la question en la manière que je viens de la rapporter, quoique avec un peu plus d'étendue, mais de fort peu. Je conclus en faveur de Tallard, et tous les avis furent conformes au mien.
La Vrillière écrivit sur-le-champ la décision sur le registre du conseil; puis alla, par ordre du régent, appeler les deux maréchaux, à qui La Vrillière ne dit rien de leur jugement. Ils se tinrent debout au même lieu où ils s'étaient mis d'abord; nous nous rassîmes en même temps que M. le duc d'Orléans, qui à l'instant prononça l'arrêt que le maréchal d'Estrées prit de fort bonne grâce et très honnêtement, et Tallard fort modestement. Le régent leur dit de prendre place, se leva, et nous tous, et nous rassîmes aussitôt. Tallard, par son rang, échut vis-à-vis de moi, quelques places au-dessous.
L'excès de la joie, le sérieux du spectacle, l'inquiétude d'une dispute imprévue, firent sur lui une étrange impression. Vers le milieu du conseil, je le vis pâlir, rougir, frétiller doucement sur son siège, ses yeux qui s'égaraient, un homme en un mot fort embarrassé de sa personne. Quoique sans aucun commerce avec lui que celui qu'on a avec tout le monde, la pitié m'en prit; je dis à M. le duc d'Orléans que je croyais que M. de Tallard se trouvait mal. Aussitôt il lui dit de sortir, et de revenir quand il voudrait. Il ne se fit pas prier, et s'en alla très vite. Il rentra un quart d'heure après. En sortant du conseil, il me dit que je lui avais sauvé la vie; qu'il avait indiscrètement pris de la rhubarbe le matin, qu'il venait de mettre comble la chaise percée du maréchal de Villeroy, qu'il ne savait ce qu'il serait devenu sans moi, ni ce qui lui serait arrivé, parce qu'il n'aurait jamais osé demander la permission de sortir. Je ris de bon coeur de son aventure, mais je ne pris pas le change de sa rhubarbe; il était trop transporté de joie pour avoir oublié le conseil, et trop avisé pour avoir pris ce jour-là de quoi se purger.
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è un'arte complicata, ma riserva delle soddisfazioni, come dire... prorompenti!...)
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a Versailles mi sarei divertito molto, ma forse sarei stato meno utile...)
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uno solo di voi sa perché oggi vi infliggo questo: è passato a trovarmi oggi. E voi, quando passate?...)
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notazione sconsolata: tre secoli fa riuscivano, con una certa scioltezza, a risolvere casi molto più complessi di quelli sui quali oggi si inciampa con incredibile leggerezza. La fiducia dei mercati è importante, ma anche quella degli uomini non la trascurerei, e la mia, in particolare, si basa su un principio vecchio come il mondo, che i romani esprimono così: "come me sòni, te canto!" Io non scelgo mai la musica, e, soprattutto, non la impongo. Questo però non vuol dire che non abbia un orecchio delicato...)